
Observé fréquemment dans nos régions, le cloporte rugueux ou Porcellion rude, est très répandu dans toute l’Europe de l’Ouest; on le rencontrera volontier dans nos jardins, nos caves et parfois même, nos maisons. Depuis l’existence des transports navals et au fur et à mesure de nos déplacements en bateaux, il a vu sa distribution s’élargir aisément au reste du monde; on peut désormais parler d’une répartition à l’échelle mondiale. Bien sûr, le porcellio scaber possède ses propres limites et par conséquent, on ne le trouvera jamais des les endroits les plus arides de notre planète dépourvus de presque toute humidité, ou encore dans les zones trop chaudes de la terre. Sa préférence personnelle reste tout de même cantonnée aux conditions un tant soit peu tempérées.

Il peut être facilement trouvé dans les milieux à ambiance humide et riches en matière organique en pleine décomposition. Son élément de prédilection étant le bois en putréfaction, il est quand même possible de l’apercevoir en dessous de pierres à surface rugueuse où même de pots en terre cuite, tant que l’ hygrométrie y est plus ou moins forte. Parfois on pourra aussi le rencontrer directement dans les structures creuses ou les sous-sols de nos maisons , là où le milieu est pourvu d’une certaine humidité minimale toute l’année. Il est très important de savoir que tous les cloportes, sans exception, ne sont en aucun cas nuisibles pour l’homme et ne représentent pas une menace.

Souvent considérés par la majorité du grand public comme des insectes, tous les cloportes sont des crustacés terrestres. En réalité, ce sont les seuls crustacés entièrement terrestres qui existent, ainsi que les seuls représentants du sous-ordre des Oniscidae. Le porcellio scaber, comme les autres cloportes, respirent à l’aide de branchies contenues dans des petites poches remplies d’eau. Ces poches sont limitées par de fines membranes qui permettent alors des échanges gazeux avec l’atmosphère. Ces branchies s’appellent des pseudo-poumons. Ces crustacés terrestres étant, au départ, d’origine marine, ils ont développé, au fur et à mesure de leur vie terrestre, un type de respiration hyper-spécialisée. Ils sont tout de même sensibles au taux d’humidité présent dans leur environnement et ne tolère pas un quelconque manque d’eau trop important; ainsi, ils craignent un phénomène appelé la dessiccation provoquant l’assèchement de leur cuirasse.

A l’instar de ses cousins, ce Porcellion est nocturne et lucifuge. Ainsi, il se terre dans des endroits sombres et humides tout au au long de sa vie. Donc, pour l’observer on cherchera directement dans des emplacements du jardin où l’humidité est bien présente et où il y a une cachette lui permettant de se tapir dans l’ombre. Il est grégaire et forme des colonies d’un nombre incalculable pouvant varier de 10 à 2000 individus ( ceci est un nombre théorique se basant sur une moyenne, il est tout à fait possible de n’en voir qu’un seul comme 3000 au même endroit ).

Le Porcellio scaber se nourrit principalement de matière organique en décomposition, soit des feuilles, des racines, des fruits, du bois, des écorces, des champignons, des moisissures, des insectes et dans une plus petites proportion, d’autres animaux en décomposition. Ce qui est sûr c’est que tout ce qui est décomposé y passe.
Dans une certaine mesure, ce cloporte peut s’alimenter en très faible quantité de végétaux frais et, dans certains cas, de fruits bien mûrs. Cependant, ceci ne se produit que lorsque l’animal n’a pas de nutriments décomposés à sa disposition. Quoi qu’il arrive, ce crustacé cherchera toujours à s’alimenter en premier lieu, de matière décomposée, tant que son environnement le lui permet. A noter que ceci n’arrive vraiment qu’en cas de réelle nécessité et que le porcellion rude n’est pas un animal à craindre.

Groupe de Porcellio Scaber ( Wikimedia, CC BY 2.0)
La reproduction des cloportes est sexuée;
Les porcellio scaber atteignent la maturité sexuelle à l’âge de 3 à 5 mois selon les individus.
La période de reproduction du cloporte s’étale sur une période allant du printemps à l’automne. En hiver son activité est ralentie et sa reproduction est » mise en pause » jusqu’aux premiers jours de beau temps. Néanmoins si l’hiver n’est pas trop rude il se pourrait qu’il n’y ai pas de pause de reproduction pendant cette période; cependant, il est toujours possible qu’une forte gelée surprenne les juvéniles; n’étant pas préparés au froid, ceux-ci souffriraient alors des températures négatives.
Lors de l’accouplement, la femelle se met partiellement en boule, dos contre terre. Le mâle monte alors sur un côté de la femelle pour introduire un de ses deux stylets érectiles dans un des deux orifices génitaux de la femelle. Ceci étant fait, le mâle recommence de l’autre côté avec son deuxième stylet érectile. L’accouplement fini, la femelle conserve pendant une année entière, une certaine quantité des spermatozoïdes du mâle dans une poche appelée spermathèque, ce qui lui permettra à l’avenir de se reproduire sans avoir besoin d’un mâle pendant une bonne partie de sa vie ( les porcellio scaber vivent entre 2 et 3 ans). On pourrait qualifier les cloportes, comme un genre polyandre, du fait que les femelles peuvent s’accoupler avec plusieurs mâles avant l’arrivée des jeunes et sont capables de stocker les spermatozoïdes de plusieurs mâles dans leur spermathèque.

La femelle ne va pas pondre au sens propre du terme. En effet, elle possède une poche, appelée marsupium, située à l’intérieur de son abdomen, entre les pattes, contenant les ovaires. Cette poche couvre les 2/3 de son abdomen et du thorax. C’est dans ce même marsupium que les œufs vont se développer et éclore. jusqu’à leur première mue, les juvéniles vont rester accrochés à l’abdomen de leur mère. La durée d’incubation est de 1 mois; passé ce délai, la femelle évacue les jeunes et un nouveau cycle recommence avec ou sans mâle. Elle recommencera le même cycle 2 à 3 fois sur l’année. Par ponte la femelle produit en moyenne 12 à 36 jeunes.
Le mâle se différencie de la femelle par ses couleurs argentées presque brillantes, tant dis que les représentantes du sexe opposé, auront une couleur plus matte presque beige, parfois même orangée.
Les jeunes sont blancs avant la première mue, ceux-ci changent rapidement de couleur au cours de la seconde pour devenir gris-beige. Les porcellions rudes effectuent une mue tous les mois et les juvéniles obtiennent leurs couleurs adultes entre la troisième et cinquième mue, mais ceux-ci n’ont pas encore atteint leur taille adulte.
Effectuant une mue mensuelle, les porcellio changent légèrement de couleur tout au long de leur vie. Ainsi, il est possible que certains mâles adultes aies les mêmes couleurs que celles de la femelle. Les cloportes rugueux atteignent une taille d’environ 11 à 16mm une fois adulte. La femelle est très légèrement plus large et plus grande que le mâle, ceci afin d’augmenter légèrement la surface disponible pour les juvéniles en cours de développement.

Détails du Cloporte rugueux ( Wikimedia, CC BY-SA 3.0)
Le corps d’un cloporte est divisé en trois parties :
- La tête, appelée céphalon, qui porte les organes sensoriels, des yeux composés, les pièces buccales et deux paires d’antennes dont une très petite, quasiment invisible.
- Le thorax ou péréion qui est divisé en 7 segments, chaque zone ventrale de chaque segment porte une paire de pattes, on compte donc 14 pattes au porcellio scaber ( c’est le cas pour tous les cloportes ) .
- L’abdomen ou pléion, divisé en 6 segments, porte les branchies et les organes reproducteurs.
Chez porcellio scaber on ne remarque aucune différence entre les parties du corps. Des petites bosses sont présentes au-dessus de chaque segment du thorax ainsi que sur la tête. Contrairement au cloporte commun ou armadilidium vulgare, ce cloporte ci ne possède pas la capacité de s’enrouler sur lui même; autrement dit, il ne sait pas se rouler en boule.

Cloporte sur le dos ( Wikimedia, CC BY-SA 3.0)
D’un point de vue écologique, les cloportes sont très utiles, voire indispensables, au bon déroulement de l’écosystème terrestre. En effet, ils contribuent énormément au processus de décomposition dans l’écosystème. Les aliments dont ils se nourrissent sont d’abord réduits en petits fragment avant d’être consommés; C’est comme ça que d’autres animaux ou invertébrés plus petits s’alimentent de micro-particules résiduelles obtenues. Ainsi on peut dire que la survie de tout une série de micro-organismes dépend de la présence des cloportes dans un même milieu. De plus, les excréments du cloporte vont ensuite enrichir le sol de manière très efficace en apportant une bonne dose d’azote et d’autres éléments que l’on retrouve dans les engrais naturels, de quoi contribuer un maximum à la flore de notre écosystème.

En matière de pollution, les cloportes sont employés par certains scientifiques comme bioindicateurs et biointégrateurs; En d’autres termes, la présence de cloportes dans votre jardin signifie que le terrain est peu pollué, naturel et en » bonne santé « .
Le cloporte joue aussi un rôle important dans la survie d’un beau nombre de petits vertébrés et invertébrés prédateurs. Il est d’ailleurs la proie favorite d’une espèce d’araignée, Dysdera crocata , des mille-pattes & scolopendres, de certaines espèces de crabes mais aussi de beaucoup de mammifères qui peuplent nos jardins tels que les souris, les musaraignes et les hérissons. Sans oublier bien sûr une série d’espèces d’oiseaux, de reptiles et de batraciens qui adorent se nourrir de cloportes.
Liste en photo de quelques prédateurs du porcellio scaber :








On constatera un certain nombre de parasites dont la plupart des cloportes sont les hôtes ou les hôtes intermédiaires; on citera d’ailleurs l’espèce Acuaria spiralis qui se sert du cloporte comme hôte intermédiaire avant d’atterrir chez les gallinacés. Ils peuvent aussi être les victimes de quelques diptères parasitoïdes qui, contrairement à beaucoup de parasites standards, tueront l’hôte à court ou à long terme.
Nuisible ou pas ?
Qu’on se le dise, les cloportes ne sont en aucun cas nuisible pour l’homme ou pour les plantes de nos jardins. Ainsi même si vous en trouvez au beau milieu de votre cuisine, dans votre cave ou dans les creux de vos murs, il n’est pas nécessaires voire déconseillé d’éliminer ces petits individus qui en réalité n’en peuvent pas grand chose et qui, pour sûr, ne piquent pas et ne mordent pas. Le seul moyen efficace et inoffensif que l’on pourrait mettre au point en prévention, si vraiment on a pas envie d’en voir chez soi, c’est de placer quelques grains de gros sel dans les recoins humides de notre habitation. Cependant, je tiens à insister sur le fait que ces invertébrés ne sont vraiment pas nuisibles pour nous et qu’ils constituent vraiment un pilier de notre écosystème et de notre biodiversité.
Pour info:
Pour l’amateur de cette petite bête qui est en réalité très paisible et sympathique, pour les férus de cloportes et les collectionneurs de crustacés; il est indispensable de savoir que dans certaine région du monde on élève des variétés de porcellio scaber chacune très particulières!
En voici une liste non exhaustive :
- Porcellio scaber ‘ Ghost ‘
- Porcellio scaber ‘ Orange Koï ‘
- Porcellio scaber ‘ Calico ‘
- Porcellio scaber ‘ Orange Pied ‘
- Porcellio scaber ‘ Piebald ‘
- Porcellio scaber ‘ Starburst ‘
- Porcellio scaber ‘ Dalmatian ‘
- Porcellio scaber ‘ Orange Dalmatian ‘
- Porcellio scaber ‘ Koï ‘
Étymologie :
Le mot porcellio provient du latin et signifie petit cochon; Quant à scaber qui vient lui aussi du latin, il signifie tout simplement rugueux.
A noter qu’on nomme cochons de cave tous les cloportes de manière plus générale.
Sources
- Wikipedia
- Wikimedia
- Pxhere
- Animal diversity.org
- ISSG database
- Parisitepedia.net
- Université de Lille
- Climate-data.org
- Veterinary parasitology, auteur : M. A. Taylor, R. L. Coop, Richard L. Wall